Mon nez est un coureur de jupons, un frivole et désabusé cruzeur. Un frénétique nymphomane d’effluves, d’odeurs. Mes narines, dévergondées, s’offrent systématiquement comme réceptacle à tout ce qui passe, tout ce qui se sent. Un morceau de carton humide, une plante d’un vert étrange, un textile, une cire colorée, la chair d’un fruit, sa pelure, un chandail neuf, une serviette froide, une serviette chaude (immense différence), un pelage. Peu importe. Chaque chose qui est à distance raisonnable de mon nez, je le sens, je le hume, je l’analyse olfactivement.
Le monde des odeurs est le plus riche, le plus varié. Chaque note se détache, s’attarde dans mes narines. L’odeur fromagère, crémeuse et amère d’une sauce alfredo. L’odeur foncée, profonde et acidulée d’une fraise, d’une framboise. L’odeur verte et saline d’un maillot de bain séché au soleil. L’odeur folle et essoufflée de mon clavier d’ordinateur.
J’aime le sucré, le salé. L’acide, l’amer. Le tonka, le Grenoble. J’aime l’odeur franche, blanche et fruitée d’une brise, d’une tempête. J’aime l’odeur plastique et chauffée d’un DVD, fraîchement extrait du lecteur. J’aime l’odeur du froid, du frimas sur la vitre d’une voiture rouillée. J’aime l’odeur d’un baiser sur le nez, d’un baiser sur la joue. J’aime l’odeur poussiéreuse de ma peau, le matin. J’aime l’odeur d’une ampoule fraîchement brûlée. L’odeur du satin froid. L’odeur du métal oxydé. L’odeur de l’eau d’un bain rempli d’eau, et oublié.
J’aime sentir le monde, le mettre à mes narines, et le juger.
lundi 11 avril 2011
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