mercredi 15 août 2012

The Cat Thing

The cat thing ou l’exploration de la culpabilité débile d’une étourdie qui envisage les chats comme des humains. De mon déménagement dans un nouvel appartement découlait naturellement l’arrivée dans ma vie d’un chat. J’en étais privée par la situation précédente et le changement renversait cette triste réalité. Depuis des semaines, je tâtonnais sur les sites de refuges félins, je magasinais un animal avec le vent dans les cheveux puisque toute ma vie, j’ai jouis de la présence d’animaux autour de moi et ça me manquait. Après moult réflexions, nous avons adopté une vieille chatte de neuf ans, craintive et fragile. Son environnement se devait d’être calme, la jolie demoiselle du refuge nous l’avait précisé. S’en suivirent quelques jours d’idylle, de nuage timide de début de relation qui, évidemment, se soldèrent avec l’arrivée de la réalité. Je ne dis pas que cette pauvre chatte, Odile, m’a déçue, je dis simplement qu’après quelques jours à entretenir l’illusion du début, la politesse de la timidité et de la retenue, les deux partis montrent leur vrai visage sans gêne, sans le masque du « vouloir bien paraître. » J’humanise les chats, I know. Bref, la déception se pointe sous toutes les formes, la mienne fut une morsure. J’ai découvert à ma vieille chatte, que je me dessinais docile et affectueuse, un côté tigresse cruelle. Sans parler en métaphores plus longtemps, elle m’a sauvagement mordue une bon soir et j’ai cru déceler en elle une sournoiserie méchante qui m’a brisé le cœur. Bref. Une soirée tiède quelconque qui, dans mes souvenirs, allez savoir pourquoi, ressemble à l’automne, je marchais vers chez moi et un chat s’est faufilé entre mes pattes. Sans que je ne comprenne vraiment ce qui se passait, il avait l’air de quémander de l’amour, là, à mes pieds. Je me suis penchée pour le caresser, décidée à lui rendre cet amour gratuit comme on caresse n’importe quel chat amical dans la rue, sans penser plus loin. Mais quand je suis partie, il a gémi et m’a suivie. Il n’en fallait pas plus pour que je m’attache. Eugène que je l’ai appelé, c’est venu comme ça. Des fois les prénoms s’imposent. N’empêche, querelle s’en est suivie, Louis était catégorique, je devais laisser ce chat à la porte de l’immeuble, jusqu’où il m’avait suivie. Et je l’ai fait. Trois jours durant j’ai pensé à ce minou roux si pâle qu’il avait l’air recouvert d’un mélange de cassonade et de crème fraîche. Je pensais à sa queue étonnante, vraiment large et touffue mais si courte. (J’aurai essayé de ne pas faire sonner cette phrase comme une description de récit porn, mais too bad, les choses sont ce qu’elles sont.) J’étais triste d’avoir frôlé un nouveaux quelque chose, une relation impromptue et étrange, et surtout, d’imaginer un chat si gentil vivre sous les arbres à la merci des intempéries. Bref, un autre soir – je vis de soir - alors que je rentrais chez moi, au tournant de la 26e rue, Eugène est apparu. Je tourne la tête et il est là, à courir vers moi comme si je lui avais manqué et que j’étais enfin de retour. Depuis, on ne s’est pas vraiment laissés. Je l’ai fait entrer chez moi, peu importe ce que Louis pouvait en penser, et je lui ai laissé, sans questions ni attentes, élire domicile vague dans mon appartement. Et, malgré quelques petites absences, il revient toujours attendre sur le palier de la porte de la cuisine, prêt à venir dormir, manger et se prélasser contre mes cuisses. La mise en situation fut longue, mais voilà le cœur de l’idée, the cat thing. J’aime Odile malgré son agressivité. Évidemment, l’arrivée de Doris – Eugène était finalement un prénom inadéquat, le chat étant finalement une chatte- ne lui a pas plu. À son naturel renfrognée et timide s’est ajouté, j’en suis plus que certaine, une part de rancune. Rancune contre moi, sa maîtresse, qui est arrivée avec ce chat qui prend toute la place et qui, visiblement, comble mes attentes. Et moi je suis là, à culpabiliser d’entretenir, sous les yeux d’Odile, une relation qui semble si riche avec Doris. À chaque caresse, à chaque frottement, j’ai l’impression qu’Odile me regarde et m’en veut. Son agressivité augmente et les quelques marques d’affections du début se sont effacées pour ne laisser qu’un chat amer qui, bien honnêtement, m’effraie. Odile serait peut-être mieux dans un autre foyer, avec une vieille dame qui lui consacre la totalité de son attention et qui ne lui impose pas d’intrus. Mais Doris est une présence aléatoire, qui entre et part au gré du vent, sans aucune attache tangible. The cat thing : Est-ce que je suis en train de démolir une relation féline établie et officielle, quoi que décevante, pour une autre relation peu sûre et aléatoire mais riche ? Et je culpabilise de seulement penser à la réponse.

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