vendredi 10 septembre 2010

Embrayer et enrayer sa vie

Fort Lauderdale, c’est une chose pas possible. Une beauté belle, belle.

Si je n’aimais pas le Québec à m’en manger les doigts, je pourrais vivre dans un endroit comme celui-là, où l’eau est partout, le bleu, la chaleur. Il me semble que tout serait simple, ici. Mais peut-être pas, aussi. Mes frères me suivraient, et tout recommencerait. Je les aime mes frères, mais ça paraît qu’on ne vient pas de la même place, qu’on n’a pas le même père. Eux, ils se spécialisent dans les petites bineries, moi je vois plus grand. Moi, ma cause, j’y tiens, c’est une cause qui se transporte : Rémi c’est l’argent, moi c’est un pays. On voit tout de suite la différence. Un pays ça grandit, de l’argent, ça finit par puer, et faire puer les mains qui l’ont trop frotté.


Je déteste conduire. Je conduis trop. J’ai toujours mille places où aller, pour mes à côtés, que j’appelle, mes contrats dans l’immobilier. Non pas que ça m’intéresse vraiment, mais j’ai pour mon dire qu’un gars doit manger, bien manger, dans des belles places. Alors je m’arrange pour le faire. Reste que ce matin, la route est tranquille, c’est facile de partir dans ma tête. Avec l’empire que je me suis bâti, j’ai toujours quelque chose à quoi réfléchir, même si ce sont souvent des choses secondaires qui me causent plus de soucis que de plaisir.
Je devrais m’arrêter, il faudrait que j’aille aux toilettes. Je le savais que j’aurais dû y aller avant de partir, mais ça me gêne quand je ne suis pas tout seul.

Je n’aime pas l’idée que quelqu’un sache que je suis en train de chier, parce que c’est impossible de ne pas le savoir, ça s’entend et ça se sent, surtout, ces affaires-là. Il n’y a pas juste la marde qui se sent, il y a le trouble aussi. Le trouble dans lequel je me suis mis. Je m’en doute que les gars avec qui je fais affaire ne me laisseront pas de chance, s’ils ont l’occasion ou une raison, bonne ou mauvaise, pour me faire la peau. Sauf que j’espère qu’ils savent qu’un gars averti en vaut deux, trois dans mon cas.

Parce que je le sais qu’ils aiment plus l’argent que la cause, eux aussi, et qu’entre être un Canadien riche ou un Québécois pauvre, ils préfèrent le rouge, rouge billet de 50. Le truc, je l’ai réalisé depuis longtemps déjà, c’est d’avoir l’air de rien.
Avoir l’air de ne pas trop savoir ce que tu fais, de ne pas trop avoir l’air au courant de tes affaires et d’être poli, trop gentil, gentleman, même. C’est comme ça qu’on se fait sous-estimer, et qu’on surclasse les autres, justement ceux qui pensaient nous faire la peau.

Vraiment, c’est beau Fort Lauderdale, surtout les banlieues, les banlieues chic, bien aménagées, paisibles. Le contraire de mon trou à rat, plein de rats, justement. Des rats, ici, il n’y en a pas beaucoup. Justement! Pendant que j’y pense, je devr.




Ce que pouvais bien penser Ted Belleau, personne ne le saura jamais, parce que justement, Ted Belleau n’est plus, sa voiture a pris feu si subitement, que la carrosserie s’est emballée et est allée tourner plusieurs fois sur elle-même, un peu plus loin. À la petite école, ils nous disaient de se rouler par terre, parce que c’est ce qu’il faut faire, si on prend feu, et cette voiture s’en souvenait. L’explosion provenait d’en-dessous, d’une place stratégique où une vulgaire étincelle éclaterait tout, déjanterait la scène, inverserait le cours des choses. Une voiture, habituellement sur ses roues, se retrouverait, calcinée, sur son toit, et ce serait comme ça.
Et c’est comme ça que ça se passe, pour les hommes comme ce Belleau, parce que même quelqu’un d’averti ne vaut pas une flamme dans un réservoir d’essence, quand bien même il le voudrait.

Ted Belleau se croyait sur ses gardes, il ne l’était pas assez, et n’était donc plus rien.

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Voici mon premier travail d'université! C'est diablement stressant, parce que je n'ai aucune idée de ce que je peux, et ne peux pas faire.
Écrire un segment qui raconte l'accident organisé d'un mafioso qui complote pour l'indépendance du Québec avec des gens pas trop nets.
Voila.

2 commentaires:

  1. Cette semaine, j'ai eu à faire un exercice qui ressemble un peu trop au tien. Je pense, mademoiselle, que nous suivons le même cours.

    Ça me trouble un peu, j'ai l'impression que ma "vie technologique" épouse celle de mon quotidien et n'en font qu'une, et je ne suis pas certaine d'aimer ça... ha ha !

    Fait cocasse, s'il en est un, à part, ton texte est bon ; j'aime bien quand la voiture roule, et que tu fais un parallèle avec ce qu'ils nous montraient à la petite école. Ou le truc du billet de 50 rouge : bien songé.

    Bref. J'suis quand même curieuse, et je porterai attention quand le prof prendra les présences. Parce qu'on ne m'a pas dotée du don de la mémoire des visages à la naissance.

    Bonne session, donc.

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  2. Bonjour chère Isabelle!
    En premier, merci tellement pour tes commentaires! ça me fait toujours plaisir, surtout qu'on ne se connaît pas, et que j'aime penser que des gens inconnus lisent mes affaires <3
    Et deuxièmement, humm c'est troublant! haha Je suis dans le cours de Jocelyn Bérubé, le mardi, de 8h30 à 11h20... et toi?

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