lundi 13 décembre 2010

quatre glaçons

Une tempête rageuse, semblable à celles qui fermaient les écoles et poussaient les piétons à se réfugier n’importe où, faisait rage sur le boulevard Laurier, le paralysant totalement. Plus tôt dans la journée, à l’improviste, un vent cinglant s’était levé et de lourdes rafales de neige avaient commencées à débouler. Alors qu’un capharnaüm d’automobiles se dépêtrait sous leurs yeux, les quelques piétons restant ne pouvaient qu’espérer être plus lourd que le vent, qui faisait valser la neige en tout sens autour d’eux. Au fil des heures, l’artère principale de la ville était devenue complètement déserte. Même le système de transport en commun avait abdiqué. Or, dans cette violence hivernale, quatre piétons n’avaient pu trouver autre refuge qu’un abri vitré de terminus d’autobus, et y étaient restés, attendant le calme : deux jeunes filles d’une douzaine d’années, qui se ressemblaient étonnamment, une femme à l’air abattu, inquiète et nerveuse, et un homme très grand. Camille, la jumelle qui avait du caractère, s’impatientait. Son reflet, sa jumelle, la regardait avec le même air qu’elle affichait toujours devant elle, un air respectueux et presque craintif. Elle semblait attendre que Camille décide quelque chose. Dans la promiscuité du refuge, la femme inquiète tentait de se tenir à l’écart. Distante, elle grelottait de peur plus que de froid, et regardait la neige s’accumuler. Tandis que tout le monde évitait soigneusement de se regarder, l’homme demanda brusquement, de sa voix forte doublée de l’écho, si quelqu’un avait quelque chose à manger. Alors que personne ne répondait, il ajouta de sa voix creuse qu’il mourait de faim. Ce à quoi Camille répondit d’un hochement de tête négatif, l’air agacé, suivie de sa sœur. La femme, toujours en retrait, se contenta d’ignorer la question.
La neige montait sur les quatre parois de vitres et donnait l’étouffante impression aux réfugiés d’être emmurés dans un bloc de glace. Discrètement, l’effacée des deux jumelles, envahie par la peur, se mit à pleurer silencieusement. Sa sœur, irritée, soupira d’agacement. Sa sœur pleurait toujours. La femme, tapie dans un coin, à la vue des larmes, sembla prendre vie et sortit de sa torpeur. Elle s’approcha de la jeune fille en larmes et la prit dans ses bras, sous le regard effaré de Camille. Rapidement les choses s’envenimèrent. Sa jumelle lui semblait tellement ridicule, toujours à pleurer. Après avoir pris la main de sa sœur pour la tirer vigoureusement des bras de cette femme, elle lui dit qu’elles partaient, elle en avait assez. Instantanément, sa jumelle acquiesça, elle était bien d’accord pour partir. Camille ne l’avait presque jamais induit en erreur, après tout. Presque jamais, puisqu’aujourd’hui, elle l’avait fait. Elle avait encouragé sa sœur à aller se promener sur le boulevard Laurier alors que leurs parents étaient absents, si bien que maintenant, personne n’était au courant qu’elles étaient dans un abri d’autobus avec deux étrangers. Alors que les deux sœurs marchaient vers la sortie vitrée de leur refuge, l’homme leur hurla d’arrêter. Du même ton autoritaire dérangeant, il leur fit savoir qu’il était hors de question qu’elles sortent seules dans une tempête si violente, ce à quoi Camilla répondit d’un éclat de rire défiant, bien consciente de sa bravoure. La tension monta d’un cran lorsque les deux engagèrent une houleuse conversation. L’homme refusait catégoriquement de les laisser sortir et Camille s’époumonait à crier, la peur et l’adrénaline la portant à bouts de bras, et se heurtait sans cesse au refus de l’homme, qui lui barrait décidément le chemin. Cet homme, il n’avait pas l’intention de les laisser aller mourir de froid, perdues dans la tempête, sans s’interposer. Jamais. Il voyait que la pauvre lui en voulait et qu’elle tentait de lui tenir tête, même si c’était peine perdue. Elle pourrait tempêter autant que le vent sur ces vitres, jamais il ne les laisserait aller se faire tuer, point final, se disait-il. Camille chancelait, elle allait lâcher prise lorsqu’elle vit sa jumelle, enlacée avec la femme qui n’avait encore rien dit. Elle lui caressait les cheveux et la réconfortait. Hors d’elle, elle ordonna à sa sœur de la suivre, elles partaient. Camille augmenta le ton et regarda sa sœur, obéissante, tenter de s’arracher de l’étreinte de la femme pour la rejoindre. Mais cette dernière ne l’entendait pas de cette façon. Attendrie par la pauvre petite jumelle faible, cette femme avait sentie poindre en elle un maternalisme qu’elle ne se connaissait pas. La plus forte pouvait partir, mais l’autre restait avec elle. Alors que l’homme lui barrait toujours le chemin, Camille regarda l’étrange femme, muette depuis le début, serrer sa sœur contre sa poitrine froide. Sa pauvre sœur qui, une lueur de panique dans les yeux, regardait Camille avec un air effrayé et incompréhensif.

5 commentaires:

  1. est-ce que tu as imaginée une suite à cet histoire Amélie? parce que la je suis toute intriquée! Qu'arrivera t'il aux deux jeunes filles?

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  2. hahah c'est toi Julie?
    Bah disons que j'ai ma petite idée. Mais c'est loin d'être fait.

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  3. Oui c'est moi Amélie! :D Tu as un nouveau tattoo? j'ai hate de le voir! Je parie que c,est un chat, dans ton dos avec une phrase cul-cul? (jniaise) Des roses? mon nom en gros? salut xxx

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  4. tu as le bonjour des cafards qui ont apprécié le "mordant" de cette histoire

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  5. ha je veux savoir le reste de l'histoire!

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