lundi 16 février 2009

Les chaussures trouées (nouvelle à chute's time)


Les journées d’hiver où le soleil est particulièrement perçant sont toujours les plus étranges.

J’attends l’autobus qui, péniblement, me ramènera chez moi. Massé dans une foule étanche et compacte, j’ai rudement froid.

Je déteste tant avoir froid. Particulièrement aux pieds. Ma vie actuelle ne me permettant pas de me procurer des chausses qui emmitoufleraient décemment mes pieds, j’encaisse.

Avec de la glace sur les orteils.

Comme la centaine approximative d’êtres à mes côtés qui martèlent la neige de leurs pieds, mieux chaussés que les miens, j’ai eu une journée.

Puisque tout le monde à toujours une journée, rendu au presque soir.

Vous savez, le moment de la journée où le soleil, comme pour mieux s’endormir, redouble d’ardeur avant de s’éteindre pour une face de la terre. Ni le soir, ni la journée. L’entre-deux.

Le presque soir, quoi.

Bref, avoir une journée n’est pas chose simple et légère. Non, la plupart d’entres nous ont des journées longues et lourdes, qui pèsent sur les épaules et qui forcent à fléchir un peu le tronc. Voilà donc pourquoi les citoyens qui partagent mon arrêt d’autobus ont tous cette position; penchés légèrement vers l’avant, l’air d’être prêts pour une éventuelle chute. Victimes du poids de leur vie.

J’aime regarder, poser mon humble regard de regardé sur chaque parcelle de
population qui se trouve à ma portée visuelle. Regarder, détailler, analyser, juger parfois, rarement objectivement je dois l’avouer, et j’en passe.

Le soleil m’aveugle et le froid me donne de la difficulté à respirer, comme si les molécules d’eau en suspension dans l’air devenaient glace à mon contact et se collaient aux parois de mon nez.

Je déteste encore plus grelotter. Mes quenottes jaunâtres s’entrechoquent furieusement entre mes lèvres gercées et je suis, depuis un moment déjà, franchement irrité. Il faut dire que mon manteau est considérablement usé et que mon couvre-chef est, en quelque sorte, absent. Un chapeau ne protège pas vraiment du froid après tout, mais mes quelques cheveux restant, quant à eux, oui.
Mais bon, que reste-t-il quand vous avez froid? Les autres.

Regarder les autres me réchauffe. Mais ce soleil m’aveugle!

Si seulement le soleil pouvait calmer ses ardeurs et délaisser mon œil! Des lunettes de soleil, ça coûte cher!

Trop cher.

Partout où je regarde, le foutu soleil me saute à la figure et me fais plisser les yeux. C’est presque douloureux.

Utopique, une boule de feu m’empêche de me réchauffer.

Il me fait baisser la tête, pour esquiver ses rayons. On dirait qu’ils m’attaquent personnellement.

C’est quand j’ai relevé la tête, complètement frustré par la force du soleil, que j’ai vu.

L’autre côté du trottoir, planté au milieu d’une foule, une personne.

Qui franchement, jure dans le lot. Un vrai contraste. Tellement qu’elle englue mon regard.

Comme elle semble triste, cette pauvre personne. Seule, sans la solitude physique.

Qu’y a-t-il de pire que d’être seul dans une foule?

Je plains ce pauvre être. Mon dieu! Comment peut-on en arriver là?

Quelqu’un devrait lui apprendre que c’est l’hiver! Un chandail doublé ne suffit pas pour se préserver du froid. Sans parler de ses chaussures! Pires que les miennes, visiblement.

Et cet air!

Renfrogné, frustré, haineux. Rien de plus désagréable comme personne à côtoyer!

Les gens, d’ailleurs, semblent réellement l’éviter. La manière qu’ils ont de s’entendre collectivement pour ne pas s’en approcher, et encore moins le frôler, ne ment pas.

Décidément, cette personne fait peur. Une décrépitude.



Et le clochard ne bougeait plus, obnubilé par son reflet dans l’immeuble miroir en face de la rue.
Les prises de conscience font mal.



(La photo est celle d'une toile de Bartolommeo Esteban murillo. Magnifique. C'est un peintre Baroque, petit clin d'oeil à Mathieu)

2 commentaires:

  1. hahaha Amelie et ses histoires d'autobus si interessants :P

    peut etre que le ''pauvre gars'' a simplement passé une tres tres tres mauvaise journée... ca se pourrais non?
    Moi j'ai deja passé une journée telement poche là!
    Tout a commencé avec mon arrivé a l'école ou j'ai.... lol tu pensais pas vraiment que j'allais te conter l'histoire complete d'une de mes journées sur un commentaire de ton blog? :P

    je dois tout de meme me mettre a ta place (toi qui lit tout mes commentaires peu importe si ils sont bon ou pas). sans oublier que je parle beaucoup maois je n'ai pas tant de chose que sa a dire.

    Bref, si le soleil te dérange autant, demande lui poliment de se tasser et il n'aura pas le choix,

    Daniel

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  2. mais heuu..
    soit j'ai mal compris ton commentaire, mon Dan, soit tu as mal compris.

    Le narrateur, c'est pas moi.
    C'est le monsieur qui se regarde dans l'immeuble d'en face.

    lool..
    HI lala!

    ;)

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